Le festival

Vincent Dumestre et les artistes du Poème Harmonique ont imaginé un projet fou pendant le premier confinement : vivre la musique baroque À ciel ouvert.  Ainsi retrouvent-ils leur répertoire dans le cadre fascinant des jardins du château du Champ de Bataille en Normandie, que le célèbre décorateur Jacques Garcia a restauré et réinventé depuis 20 ans. Vincent Dumestre et Jacques Garcia ont imaginé ensemble ce festival avec le souhait de faire revivre au public, par la grâce des jardins et l’émotion de la musique, l’âme du baroque : un voyage aussi réel que contemporain dans l’imaginaire du peintre Watteau.

Vincent Dumestre, pourquoi un nouveau festival ?

Depuis un an, je rêve de la joie que nous avions d’être sur scène, je rêve de public ! Mais après cette longue période traumatisante, il faut nourrir notre rapport au public autrement, il faut apporter de nouveaux espaces de construction des projets, il faut permettre au public d’écouter de nouvelles œuvres, mais aussi de les écouter autrement. Nous avons tous besoin de respirer, et À ciel ouvert se veut un appel d’air… baroque !

Comment décririez-vous votre rencontre avec Jacques Garcia ?

Dès notre première rencontre j’ai été absolument fasciné par la personnalité de Jacques Garcia. Non seulement parce qu’il a restauré ce château avec une patience, une énergie, une vision et un savoir-faire uniques, mais surtout parce qu’il le rend vivant. Au-delà du témoin du Grand Siècle qu’il incarne, Champ de Bataille est un lieu habité, qui dépasse l’aspect muséal. Nous partageons cette passion pour le XVIIe siècle et voulons l’interpréter : c’est la différence entre la partition qui sommeille dans une bibliothèque et l’œuvre musicale jouée, offerte au public mélomane… A travers son art de recréer « son » XVIIe siècle, Jacques Garcia offre au regard ce que nous, musiciens, offrons à l’oreille. Nous faisons le même métier, et poursuivons la même utopie. 

Pourquoi avoir choisi la Revanche de Mazarin comme thématique de cette première édition ?

Ce château a été construit en 1651 par un frondeur de Mazarin, Alexandre de Créquy, exilé près du Neubourg. J’ai voulu faire revivre la figure de Mazarin à travers une programmation qui rappelle les grandes étapes de sa vie : son goût pour la musique italienne, ses liens avec l’Espagne, et bien sur son arrivée en France au milieu du XVIIe siècle.

A quel public s’adresse ce festival ?

Nous attendons un public aimant les découvertes, curieux d’écouter la musique autrement.

La salle de concert naturelle que constitue les jardins du domaine du Champ de Bataille permettent de « vivre » la musique bien différemment, et de manière adaptée à chacun. Promenades sonores, retrouvailles ou découvertes d’artistes dans les bosquets lors de courts concerts, grands concerts ou opéra dans le cadre merveilleux du Théâtre de Verdure, chacun y viendra découvrir à sa guise, en fonction de son temps et de ses envies la musique de chambre, les récitals ou les grandes formes.

 

Musique baroque rime donc avec jardin ?

Le monde change, le rapport entre l’artiste et son public aussi ! Et notre répertoire, la musique baroque, gagne à se défaire des habitudes d’écoute héritées des XIXe et XXe siècles. La musique ancienne peut certes s’écouter de toutes les façons, dans les grandes salles comme dans un casque, mais elle mérite aussi qu’on se rappelle comment elle est née. Musique de fonction, elle était composée pour un lieu et un effectif adapté à cet espace : pour la chambre royale, pour honorer l’entrée d’un prince dans une ville, pour accompagner l’office d’une chapelle ou tout simplement pour distraire une poignée d’amis dans l’intimité.

Créer ce festival dans les bosquets du Domaine du Champ de Bataille, c’est tenter de retrouver ce rapport précieux entre les artistes et le public, et de plonger celui-ci dans le souvenir bucolique des tableaux de Watteau, quand la musique se mêlait aux bruits de la nature !

Cet été nous ne serons pas totalement affranchis des contraintes sanitaires. Comment voyez-vous les choses ?

Les dimensions des jardins, les petites jauges que nous appliquons et le fait de ne jouer qu’en plein air facilitent considérablement l’application des règles qui seront simples. Nous allons proposer beaucoup de petits formats que nous multiplierons au cours de ces journées pour toucher le plus large public tout en ne prenant aucun risque de contamination.